Esther Polak
Esther Polak vit et travaille à Amsterdam. Son activité de concepteur graphique pour plusieurs revues l’amène à s’intéresser à l’influence mutuelle du texte et de l’image, puis à engager sa pratique dans le champ plus vaste de la médiation technologique, sociale et culturelle.
[http://www.estherpolak.nl/]
Amsterdam Real Time, 2002-2003
Chaque habitant d’Amsterdam a dans sa tête une carte invisible de la ville qui détermine la façon dont il s’y déplace. Amsterdam RealTime tente de visualiser cette “carte mentale” en examinant la
façon dont se trace la mobilité des usagers de la ville. Pendant 2 mois (du 3 octobre au 1er Déc. 2002) environ 60 habitants d’Amsterdam étaient invités à se doter d’une unité de traçage constituée d’un appareil portable développé par Waag Society équipé d’un GPS. En utilisant les données satellite, le traceur calcule sa position géographique, envoie ces données en temps réel vers un point central. En rendant visible ces données sur un fond noir, des points, des traces et des lignes apparaissent. À partir de ces lignes une carte d’Amsterdam se construit d’elle-même, composée des seuls mouvements des habitants en dehors du référencement traditionnel des rues ou les blocs de bâtiments.
Quand des types différents d’usagers dessinent leurs lignes, il devient clair pour le récepteur à quel point la carte d’Amsterdam peut-être individuelle. Un cycliste va produire des itinéraires complètement différents de ceux d’un automobiliste. Ce sont les moyens de transport, la position du domicile, du lieu de travail ou d’autres activités et la carte mentale d’une personne en particulier qui déterminent ses traces. Dans ce sens, une carte d’Amsterdam toujours changeante, toujours à jour et toujours subjective va naître. Les participants reçoivent une impression de leurs routes personnelles à travers la ville, leur journal de traces.
Aux 150 ans de vision cartographique influencée par le regard surplombant du cartographe se superpose une carte vivante du même Amsterdam, créée par les technologiescontemporaines. Le visiteur se voit alors proposer une lecture cartographique dans laquelle il est directement convoqué dans une référence constante aux notions de voyeurisme, d’identification et de participation (des informations concernant l’identité des participants sont disposées sur une table, il peut à tout moment interrompre le processus collectif en demandant au système de reconstruire en accéléré l’une des traces sur une carte vide).
La carte issue du projet est toujours visible sur le web
Projet développé en collaboration avec la Waag Society, Amsterdam
Expositions
Maps of Amsterdam, 1866-2000, Amsterdam City Archive, Amsterdam, 2003.
[http://www.waag.org/project/amsterdamrealtime]
Textes et documents de référence
POLAK, Esther, Mental Map / Real Map, Journal For Insiders 1, 2002
[http://www.beelddiktee.nl/tekst/JournalForInsiders01.pdf]
Esther Polak, Entretien avec Andrea Urlberger, in URLBERGER, Andrea, Paysages technologiques, Théories et pratiques autour du GPS, 2005 / 2007
[http://www.ciren.org/ciren/laboratoires/Paysage_Technologique/art/polak/index.html]
Milk, 2002-2003 & Nomadic Milk, 2009
« When you look at a specific kind of landscape you get a certain image that doesn’t necessarily tells you anything about the reality of the space. It’s very interesting for me to try to make visible the mobility that is expressed by the landscape as a very strong reality, and the economic power behind it. »
« Lorsque l’on regarde un type de paysage spécifique, on en obtient une
certaine image qui ne rend pas forcément compte de la réalité de cet espace. Ce qui est intéressant à mes yeux est de rendre visible la mobilité qui s’exprime dans le paysage comme d’une réalité très forte, ainsi que celle du pouvoir économique caché derrière.»(1)
Milk est une interprétation des paysages, des mobilités, et des dimensions économiques complexes générées par la route du lait depuis
Latgale en Lettonie, où le lait est produit, jusqu’aux pays bas où il est consommé. Un dispositif GPS repère et restitue les trajets des acteurs de ce réseau représentés par 9 participants d’un bout à l’autre de la chaîne : éleveurs lettons, grossiste laitier, propriétaire de l’usine de fromage, transporteurs, fromagers, consommateur. Le projet consiste à relier les traces GPS de chacun des participants, représentées sous formes de tracés projetés sur un écran, à leurs propres réactions et commentaires rassemblés dans un film projeté
simultanément sur un autre écran. Contrairement à un film documentaire classique, se sont ici les tracés GPS qui génèrent la narration. Moins que la vie quotidienne de ses participants, il met en évidence les effets d’une forme de médiation spécifique au GPS, celle d’une cartographie permanente de sa propre vie et la manière dont elle se relie à celle des autres. Le dispositif témoigne des questions sociales, économiques ou des histoires personnelles liées à la chaîne de production et de commercialisation du lait, sans les traiter de manière frontale mais en les laissant émerger de leur contexte.
Projet réalisé en collaboration avec Ieva Auzina, Markus The (programmation)
et Raitis Smits (site web).
NomadicMilk est construit selon le même modèle que Milk, mais se situe au Niger, où il suit les déplacements des acteurs du circuit de production et d’acheminement des produits laitiers.
NomadicMilk implique directement deux types d’acteurs : les Fulani et les transporteurs des produits laitiers de la marque PEAK. Ces derniers sont très présents dans l’alimentation quotidienne des Nigérians où on les trouve vendus un peu partout, la plupart du temps dans de très petites boutiques. Leur acheminement depuis les énormes containers du port le Lagos demeure quelque peu mystérieuses. Les Fulani sont des gardiens de troupeau nomades qui partent avec leur bétail pour des migrations annuelles afin de trouver de l’eau. Ces tracés de migration on été soigneusement choisis, à partir de la connaissance pratique ancestrales et des situations contemporaines à l’intérieur et à l’extérieur des camps.
Pour ce projet, un outil de visualisation spécifique a été conçu sous la forme d’un robot capable de dessiner avec du sable les traces GPS enregistrées des nomades et des transporteurs. Les dessins obtenus sont permettent de visualiser les déplacements dans l’espace mais aussi dans le temps : quand la trace GPS s’arrête, le robot reste immobile mais continue à laisser couler le sable, formant ainsi de “petits tas de temps” sur la ligne du mouvement. L’installation comprend ensuite cette trace de sable, ainsi que des films composés des commentaires des participants et des images des paysages traversés, constituant ainsi une sorte de forme contemporaine de représentation des paysages agrestes.
(1) Esther Polak, Entretien avec Andrea URLBERGER, in URLBERGER Andrea, Paysages technologiques, théories et pratiques autour du GPS, 8 sept. 2005, Centre pour l’Image Contemporaine, Genève, 2008.
Expositions
[Milk]
Dutch Ministry of Agriculture, Nature and Food Safety (LNV), 31 oct. – 5 déc. 2005, La Haye.
Cyberart Exhibition, en tant que lauréat du prix “Golden Nica” Ars Electronica 2005, O.K Center for Comtemporary Art, 1er – 18 sept. 2005, Linz.
Making Things Public, ZKM, 19 mars – 31 août 2005, Karlsruhe.
Justus Lipsius Building, 21-22 déc. 2004, Brussels.
AgroVak, 14-17 déc. 2004, Brabanthallen
Musée Rumbini, 2 – 10 oct. 2004, région de Limbazi, Lettonie
[NomadicMilk]
IAAF, 5-11 nov., Lagos, Nigeria.
Zaal 5, 3-24 fév., La Haye.
Who’s map is this, Iniva, 2 juin – 24 juillet 2010, Londres.
7è festival International du Film Amakula, 5-11 nov. 2010, Kampala.
ElectroSmog, 18-20 mars 2010, Amsterdam.
Textes et documents de référence
POLAK, Esther, Mental Map / Real Map, Journal For Insiders 1, 2002
[http://www.beelddiktee.nl/tekst/JournalForInsiders01.pdf]
Esther Polak, Entretien avec Andrea Urlberger, in URLBERGER, Andrea, Paysages technologiques, Théories et pratiques autour du GPS, 2005 / 2007
[http://www.ciren.org/ciren/laboratoires/Paysage_Technologique/art/polak/index.html]