Laura Kurgan

Laura Kurgan est architecte et enseignante à la Columbia University’s Graduate School of Architecture et dirige le département des Visual Studies et du SIDL (Spatial Information Design Lab). Son agence, située à New York, mène un travail transdisciplinaire où se côtoient l’architecture traditionnelle, le design, l’information et la communication, mêlés d’un fort engagement public et politique. Beaucoup de ses projets impliquent la technologie GPS, notamment à partir des images satellites haute résolution enregistrées depuis les années 60 et déclassées par le gouvernement américain en 1995.
[http://www.l00k.org/]

You Are Here (Museu), 1995

Laura Kurgan, You Are Here,  « Nine points, two lines and five letters, stationary and mobile GPS receiver on roof above Museu d’Art Contemporani de Barcelona. » 
Source :[http://www.l00k.org/you_are_here_proj/html/map_b.htm.

Laura Kurgan, You Are Here, « Nine points, two lines and five letters, stationary and mobile GPS receiver on roof above Museu d’Art Contemporani de Barcelona. »
Source :[http://www.l00k.org/you_are_here_proj/html/map_b.htm.

Dans You Are Here : Museu, Laura Kurgan interroge l’espace d’information par sa mise en relation avec l’espace architectural. Architecte de formation, elle se sert des repères qui définissent l’espace architectural, sa qualité d’espace mesurable situé dans l’environnement physique, ses limites et ses unités de mesures pour questionner celui du cyberespace. Comment peut-il s’appréhender d’un point de vue matériel, quelles sont ses limites, ses unités de mesure, ses conditions d’habitabilité ?
L’argument promotionnel du GPS le donne comme la solution ultime à la perpétuelle question de savoir où l’on est. Or, ces appareils ont longtemps contenu en eux-mêmes l’impossibilité technique de définir précisément la localisation d’un simple point(1).
Deux mois avant le début de l’exposition, Laura Kurgan avait tracé une trame, faite de lignes et de points, dessinant le mot “MUSEU” sur le toit sur musée. Équipée d’un récepteur GPS, l’artiste a effectué le parcours correspondant à cette trame, en restant immobile pendant dix minutes tous les cinq points. L’installation expose les traces GPS de ce parcours, sous forme de dessins et de pochoirs muraux accompagnés par la production en temps réel des informations de positionnement du bâtiment issues d’un capteur situé sur ce même toit.
Sur le toit du musée, la grille rigoureuse élaborée par Richard Meier qui articule les percées, délimite l’espace d’un mot virtuel : MUSEU. La structure du mot est construite dans le bâtiment, comme les caractères latents de l’écran à led d’une horloge numérique. Point par point, les données GPS sont transformées en un mot qui nomme le bâtiment et l’institution. Deux styles d’inscription s’entrecroisent, deux conventions de description ou d’interprétation : les coordonnées précises du bâtiment et les lettres du nom, de l’institution.
Les tracés GPS obtenus alors qu’elle est en mouvement, bien qu’un peu déformés, demeurent assez fidèles à la trame initiale. En revanche, les moments d’arrêts produisent une constellation de points disséminés dans un espace beaucoup plus large que celui réellement occupé. L’instrument sensé mesurer un point ou un trajet précis, révèle en fait un espace de l’ordre de l’errance et du doute. C’est cette ironie que Laura Kurgan cherche à révéler dans son travail, cette désorientation inhérente à un espace dont émerge des instruments d’orientation.

(1) Lorsque Laura Kurgan a réalisé son installation, le département de la défense du gouvernement américain n’avait pas encore mis fin à la dégradation volontaire du signal (selective avaibility), supprimé en mai 2000. La précision des GPS s’est donc accrue depuis cette date, et l’artiste n’obtiendrait pas les mêmes résultats aujourd’hui. Cependant, l’argument demeure valable en raison des nombreux paramètres qui dégradent encore aujourd’hui la précision des GPS : paramètres externes comme la météo, géométrie satellitaire, visibilité des satellites, ou internes comme la sensibilité des antennes, la vitesse de traitement ou l’algorithmes de corrections embarqués dans l’appareil.

Expositions

You Are Here : Information Drift, StoreFront for Art and Architecture, New York, 12 mars – 16 avril 1994
You Are Here : Museu, MACBA, Barcelone, 1995
You Are Here : One Mile Zone, Banff Center for the Arts, 1999

Textes et documents de référence

KURGAN Laura, Laura Kurgan: You are Here, TPI-NGS Journal, juin 1998
[http://www.thephotographyinstitute.org/journals/1998/laura_kurgan.html]
[http://www.mobilisable.net/2008/?page_id=130]
KURGAN Laura et COSTA Xavier, You are Here: Architecture and Information Flows, MACBA, 1995 Museu D’Art Contemporani, Barcelona.
« You Are Here (architecture, computing, satellites) », in YOUNGER Cheryl , Public Art and Public Space, Proceedings of the American Photography Institute, National Graduate Seminar, New York: NYU Tisch School of the Arts, 1999
Public Penetration : Issues of Voyeurism, Surveillance and Contemporary Public Art, discussion with Dennis Adams, Tony Labat, and Julia Scher. TPI-NGS Journal, juin 1998.
[http://www.thephotographyinstitute.org/journals/1998/public_penetration.html]
KURGAN Laura, « You Are Here: Information Drift » in Assemblage 25, Dec.1994.
SERRA, Catalina, « Un museo para el arte del siglo XXI », El Pais, 26 November 1995.